top of page

Quand le cerveau donne le ton : ce que personne ne vous dit sur la périménopause

  • Photo du rédacteur: Sophie Carrera
    Sophie Carrera
  • 16 juin
  • 5 min de lecture

Dernière mise à jour : 12 sept.

Il est des métamorphoses qui ne font pas de bruit. Pas d’annonce officielle, pas de transformation spectaculaire.

Juste une fatigue qui ne passe pas, une humeur plus fragile, des nuits fragmentées, une sensation étrange que quelque chose a bougé. Une impression diffuse d’être moins soi-même, sans pouvoir mettre de mots dessus.

Pourtant, cette transition a bien un nom. Elle s’appelle périménopause. Et elle commence bien avant que nous en soyons conscientes.

ree

Trop souvent, on ne rattache les changements liés à cette période qu’à un effondrement hormonal soudain, une chute d’œstrogènes ou de progestérone vers 48 ou 50 ans. En réalité, la périménopause est un processus lent, progressif et souvent invisible, qui débute parfois dès la trentaine. Et c’est d’abord le cerveau qui en donne les premiers signes.



Le cerveau, premier à percevoir la transition

Des recherches récentes menées par l’université de Weill Cornell (New York), publiées dans Scientific Reports en 2021, ont mis en lumière un fait peu connu : le cerveau change avant même que la ménopause ne soit cliniquement déclarée.

Grâce à des IRM cérébrales réalisées sur des femmes en pré-ménopause, en périménopause et en post-ménopause, les chercheurs ont observé une modification des zones impliquées dans la mémoire, la régulation émotionnelle et la cognition. Ces changements sont corrélés à la fluctuation des œstrogènes, mais révèlent surtout que le cerveau réagit et s’adapte très tôt à cette transition hormonale.

La périménopause ne commence donc pas dans les ovaires, mais bien dans le système nerveux central.


La perte graduelle des neurotransmetteurs clés

Les symptômes de la périménopause sont souvent attribués aux seules hormones sexuelles.

Or, dès la fin de la vingtaine et au fil des décennies suivantes, plusieurs neurotransmetteurs essentiels à notre équilibre mental et émotionnel commencent également à décliner.


1. La dopamine

La dopamine est le neurotransmetteur de la motivation, du plaisir, de la curiosité. Elle commence à décroître doucement autour de 25-30 ans, bien avant les premiers signes visibles de vieillissement.

Cette baisse naturelle affecte la capacité à se projeter, à entreprendre, à ressentir du plaisir dans les petites choses. Ce n’est donc pas un hasard si, autour de 35-40 ans, certaines femmes disent ne plus avoir de goût à rien sans pour autant comprendre pourquoi. Comme l’explique la neuropsychiatre Louann Brizendine dans son livre The Female Brain, la chute de la dopamine influence directement le sentiment de vitalité et d’élan intérieur.


2. La mélatonine

Hormone du sommeil par excellence, la mélatonine diminue sensiblement à partir de 35 ans. Cela se traduit par des endormissements plus longs, des réveils nocturnes plus fréquents et une sensation de fatigue matinale persistante.

Une étude de 1997 publiée dans The Journal of Clinical Endocrinology and Metabolism a montré une baisse significative de la production nocturne de mélatonine chez les femmes à partir de la quarantaine, ce qui peut désorganiser profondément le rythme circadien.


3. La sérotonine

La sérotonine est essentielle à l’équilibre émotionnel, à la gestion du stress, à la régulation de l’appétit et du sommeil. Ce neurotransmetteur dépend en partie des œstrogènes pour être synthétisé et stabilisé. Lorsque les taux hormonaux deviennent fluctuants, la sérotonine devient instable, elle aussi.

Résultat : sautes d’humeur, anxiété accrue, tendance à la tristesse ou à l’irritabilité. L’étude Estrogen and brain function: beyond memory publiée en 2005 dans Neurobiology of Aging démontre l’influence directe des œstrogènes sur la production et l’action de la sérotonine dans le cerveau.


4. L’hormone de croissance (GH)

L’hormone de croissance, que l’on associe souvent à l’enfance et à l’adolescence, joue un rôle fondamental tout au long de la vie. Elle soutient la régénération cellulaire, la masse musculaire, la récupération physique et la tonicité générale.

Sa production commence à diminuer dès 25 ans. Sa baisse lente mais continue participe à la sensation de fatigue chronique, à la perte de fermeté du corps et à un certain ralentissement de la récupération physique. L’Endocrine Reviews en 1996 soulignait déjà l’impact profond de cette chute sur la vitalité globale des femmes adultes.


5. L’acétylcholine

Moins connue, l’acétylcholine est pourtant cruciale pour la mémoire, l’attention, la concentration et le langage. Elle aussi est influencée par les œstrogènes. À mesure que ceux-ci diminuent, les récepteurs de l’acétylcholine deviennent moins sensibles, et la production ralentit.

C’est ce qui explique les fameux "trous de mémoire", la sensation d’avoir l’esprit embrouillé, ou les oublis fréquents de mots simples.



Le rôle central des glandes surrénales

Lorsqu’approche la ménopause, les ovaires réduisent leur production d’œstrogènes. Ce sont alors les glandes surrénales, situées au-dessus des reins, qui prennent le relais pour en produire de petites quantités.

Mais chez de nombreuses femmes modernes, ces glandes sont déjà sursollicitées depuis des années : stress chronique, rythme de vie intense, charge mentale familiale, surmenage émotionnel… Tout cela épuise les réserves de l’organisme.


Résultat : l’équilibre hormonal est encore plus fragilisé, le cortisol (hormone du stress) reste élevé, ce qui accentue les troubles du sommeil, la prise de poids, l’anxiété et l’inflammation chronique.


Une crise identitaire souvent ignorée

Ce que la médecine décrit comme une transition biologique est aussi, pour de nombreuses femmes, une crise identitaire.

Autour de la quarantaine, les enfants grandissent, l’énergie change, le regard sur soi se modifie.

Des questions profondes émergent :

Ai-je vraiment choisi cette vie ? Que me reste-t-il à explorer ? Qu’est-ce que j’ai encore envie de vivre ? À quoi vais-je consacrer les vingt ou trente années qui viennent ?


La périménopause ne se vit donc pas seulement dans le corps, mais aussi dans la psyché. Elle vient redéfinir l’identité, la place dans le monde, le rapport au désir, au corps, à la créativité.

Une invitation à voir plus grand

Non, les symptômes que vous ressentez à 40 ou 47 ans ne sont pas "dans votre tête".Ils ne sont pas exagérés. Ils ne sont pas précoces.

Ils sont le reflet d’un corps et d’un esprit en profonde mutation, bien avant la disparition définitive des règles.


La périménopause est une étape subtile, invisible parfois, mais bien réelle. Elle commence dans le cerveau, dans le système nerveux, dans la chimie délicate qui nous relie à notre humeur, notre sommeil, notre énergie. Et elle mérite d’être reconnue pour ce qu’elle est : un processus vivant, complexe, qui ne se résume pas à quelques hormones sexuelles.


Redonner à la périménopause toute sa complexité, c’est aussi offrir aux femmes la possibilité de mieux s’écouter, de mieux comprendre ce qu’elles vivent, et de se sentir moins seules face à ces changements. C’est inviter à une écoute plus fine de soi, à un accompagnement plus global, plus respectueux, et surtout plus lucide.


Car la vraie transformation commence bien avant les symptômes apparents. Elle commence dès que le corps commence à chuchoter. Encore faut-il savoir l’écouter.


Pour aller plus loin :

Posts similaires

Voir tout

Commentaires

Noté 0 étoile sur 5.
Pas encore de note

Ajouter une note
bottom of page